Niamey, 12 février (ANP)-Nous poursuivons la publication des entretiens réalisés avec les différents candidats à la présidentielle du 21 février prochain sur leurs programmes politiques. Nous vous proposons ce vendredi, 12 février 2016, ceux de MM. Mahaman Jean-Philippe Padonou, du CDP, Amadou Boubacar Cissé de l’UDR, Cheiffou Amadou du RSD et de M. Ibrahim Yacoubou du MPN.
6. Entretien avec Monsieur Mahaman Jean-Philippe Padonou, Candidat du CDP-Marhaba Bikhum
Monsieur Jean Padonou, vous êtes candidat à l’élection présidentielle du 21 février 2016. Sur quel programme entendez-vous convaincre les électeurs et électrices nigériens pour qu’ils vous accordent leurs suffrages ?
Notre programme est clair. Il est essentiellement basé sur le monde rural, la jeunesse et la femme. Nous disons le monde rural parce que jadis, le Niger avait une économie essentiellement basée sur l’agriculture et l’élevage. L’agriculture en cela que le Niger est l’un des premiers pays producteurs d’arachide. Nous avons eu la chance de connaitre cette époque. Et à l’époque, le Niger exportait plus qu’il n’en importait. Aujourd’hui c’est tout à fait le contraire. Nous avions sillonné le pays et nous avions échangé. Nous avons compris que la problématique du pays c’est le monde rural. Donc notre action sera essentiellement basée sur elle. Identifier les produits en mesures d’être exploités, exportés pour créer la richesse. Nous avons par exemple le riz. Il est temps de développer la filière.
Le fleuve Niger traverse notre pays sur à peu près 500 km, soit à peu près 1000 km de berge. Notre programme c’est de relancer la filière riz sur toutes les berges du fleuve Niger pour atteindre au bout de cinq (5) ans l’autosuffisance alimentaire en matière de riz. Et que dis-je, au bout de cinq ans, exporter dans la sous-région. Cela est faisable en se basant sur notre jeunesse. Nous avons l’Ecole d’agronomie qui forme ; mais ils vont où ces jeunes après leur formation ? Et bien, ce programme leur est destiné. Nous avons la filière oignon qu’il va falloir reprendre et restructurer. Nous avons la filière ail, la filière pomme de terre, la filière sésame et la filière souchet. Tous ces produits sont des produits de rente destinés à l’exportation pour créer des richesses. Et également ce sont les jeunes que nous allons initier à ce programme.
Le point fort de notre programme également réside dans l’élevage. L’élevage c’est l’une des mamelles de notre économie. Le Niger est le premier producteur de bétail dans la sous-région. Mais qu’est-ce que nous faisons ? Nous exportons ce bétail vers les pays tiers ! Nous, nous allons arrêter l’exportation de bétail qui ne nous crée aucune plus-value, aucune richesse. Nous nous engageons une fois élus, à créer dans les six (6) mois, les industries à ressources animales. C’est-à-dire des abattoirs qui répondent aux normes internationales pour exporter la viande du Niger en lieu et place du bovin, des ovins et des caprins. Et là également ce sont les jeunes. Donc il faut réhabiliter cet élevage qui est jusqu’ici contemplatif pour en faire un élevage productif. Créer au besoin des zones essentiellement pastorales.
Le problème qui se pose à notre élevage c’est que vous avez des zones de pâturage où il manque d’eau. A ces zones il faut donc créer des points d’eau. Vous avez également des zones où il y a l’eau mais pas de pâturage. Et là également, il faut cultiver le pâturage. Le pâturage ne doit plus être que naturel. Donc allons vers cet élevage contemplatif pour le transformer en un élevage productif. Développons les industries animalières. La viande du Niger c’est la meilleure viande. Une viande de qualité qu’il va falloir exporter dans les pays voisins ; mais plus loin une viande non pas brute, mais une viande traitée. Je serais très heureux de voir dans les étalages et super marchés en Europe la viande du Niger. Et de facto nous allons vers des industries de traitement de peau parce qu’il faut transformer ces peaux en cuir pour les exporter.
Donc vous avez une création de richesses et d’emplois. Ce programme nous ne pouvons pas le faire seul. Nous sommes obligés de traiter avec la sous-région, en ce sens que nous retournions au système de troc. Les pays du nord nous fournissent à manger et nous, nous leur fournissons de la viande. Ce n’est pas un programme utopique, parce que nous l’avions édifié depuis 15 ans quand nous étions conseiller spécial du Président Tandja. Si nous sommes élus, nous allons appliquer ce programme et s’il nous est permis de travailler avec le prochain gouvernement, nous allons l’imposer.
Nous avons parlé des jeunes. Les jeunes sont laissés pour compte au Niger. Pour nous, le jeune égale formation, égale emploi. Il nous faut pour ces jeunes, créer des centres de formation dans toutes les régions et même dans les départements. Il va falloir former les jeunes dans la maçonnerie, la plomberie, la chaudronnerie, dans l’électricité bâtiment, dans la menuiserie métallique…tous ces emplois aujourd’hui sont opérés par des jeunes qui nous viennent d’ailleurs. Pour les contrats, nous disons oui, mais ça ne doit pas excéder trois ans.
Ensuite quand vous regardez les cabinets du président de la république, du Premier ministre et du Président de l’Assemblée nationale, il y a une pléthore de conseillers et de chargés de mission. Il faut légiférer là-dessus. A notre avis il faut faire de la place, il faut recruter. Que le cabinet du Président de la république n’excède pas 100 conseillers et chargés de mission, que celui du Président de l’Assemblée et du Premier ministre n’excède pas 50. Que les départements ministériels n’excèdent pas 10. Et vous allez voir l’économie que nous allons faire pour pouvoir donner du travail aux jeunes. Il y a aussi un secteur privé qu’il faut redynamiser. Beaucoup de jeunes y travaillent mais qui ne sont pas employés. Ce sont des stagiaires. Il va falloir légiférer là-dessus.
Nous allons revoir nos richesses à savoir l’uranium et le pétrole. Vous conviendrez ave moi que le pétrole n’a rien rapporté aux Nigériens et cela est vraiment dommage. Et avec le recul, on comprend pourquoi le président Tandja était inquiet à la fin de son mandat. Voilà donc en gros ce que je peux vous dire sur notre programme, qui est repris sur notre site et dans un livret que tout le monde peut consulter.
Monsieur Padonou, comment comptez-vous mobiliser les ressources nécessaires à la mise en œuvre de ce programme ?
Avant de mobiliser, il faut faire le point sur l’état de surendettement de notre pays. Parce que ces cinq dernières années, notre pays a été surendetté et nous ne voyons pas les produits de ces investissements-là. Comment mobiliser les ressources ? Nous avons nos partenaires traditionnels, mais au-delà d’eux, allons vers le secteur privé, national, régional et international. Je connais des investisseurs privés qui sont prêts pour venir au Niger. Mais le Niger fait peur aux investisseurs.
Donc créons les conditions pour permettre à ces investisseurs de venir au Niger. Nous avons assisté la semaine dernière aux lancements des travaux de deux routes financées par des opérateurs privés, l’un nigérien et l’autre d’un pays voisin. Et si vous avez un opérateur économique nigérien qui est capable de financer 70 milliards de route et d’être payé à la fin des travaux, ça veut dire que dans notre secteur privé nous avons des capacités, des potentialités. Si également un opérateur économique voisin peut venir investir 70 milliards avant d’être payé, c’est que nous avons la preuve que le secteur privé est vecteur d’un développement économique. Nous avions tantôt parlé des abattoirs et de la filière qui seront là également financés par des privés. Donc la mobilisation des ressources comme je le disais tantot se fera à travers nos partenaires traditionnels qui sont le FMI, la BANQUE MONDIALE, la BOAD, la BAD, la BID, la Coopération bilatérale… mais également comme je le disais, le secteur privé national, régional et international.
Monsieur PADONOU si vous êtes élus Président de la République quelle sera la priorité des priorités du programme que vous venez de décliner ?
Tout est priorité au Niger. La santé c’est une priorité. Vous avez des pathologies qui se développent aujourd’hui au Niger comme le diabète, la tension… quel est le Nigérien capable de prendre en charge ces traitements ? Aujourd’hui si vous faites un AVC et qu’on vous amène aux urgences, la première ordonnance qu’on vous rédige c’est 80 000FCFA. La priorité des priorités c’est la santé pour tous. Et en cela vous avez des organismes qu’il faut complètement restructurer. Je pense à la Caisse nationale de sécurité sociale. Aujourd’hui il est inadmissible que dans nos établissements hospitaliers qu’on ne puisse pas disposer d’un plateau technique adéquat. Pas de centre de radiologie, pas de scanner… on les trouve dans une clinique privée.
Alors notre priorité c’est d’abord la santé puis l’éducation, la formation mais également la sécurité. Mais la sécurité ce n’est pas l’affaire du Niger tout seul, c’est l’affaire de toute la région. Donc nous n’avons pas une priorité ; nous avons des priorités et en cela il faut responsabiliser les ministres. Ils ont une mission ; ils doivent rendre compte. Les filières agricoles et élevage sont également des priorités, il faut que le programme soit lancé dans les six premiers mois. Une des priorités c’est également l’intégration sous régionale. Je crois que nous avons longtemps tergiversé et je crois qu’aujourd’hui, il faut que l’intégration se fasse. Nous devons avoir les mêmes programmes en matière d’énergie. Aujourd’hui le Niger ne peut tout seul régler ses problèmes énergétiques. Nous devons avoir en commun le problème de notre production agricole, production animalière…
Nous devons avoir en commun toutes ces politiques. Il faut que nous acceptions de perdre un peu de nos souverainetés respectives pour aller vers la création de ces grands ensembles qui sont la réponse à nos problèmes de sécurité et de développement. Moi je peine beaucoup pour notre jeunesse car elle n’a pas eu, ce que nous avons eu. A l’époque, vous allez à l’école, vous finissez, vous êtes orientés. Aujourd’hui l’Etat est défaillant. Nous avons un programme de construction de classes, nous avons des partenaires déjà disposés à financer ce volet. Ces mêmes partenaires sont également disposés à financer les établissements sanitaires à investir dans les filières de l’agriculture et de l’élevage ce qui va nous permettre de créer des plus-values dans tous les domaines. En matière de route, le problème fondamental c’est la construction et l’entretien des routes. Il faut donc revoir la CAFER. Elle doit être à mesure de construire et d’entretenir les routes.
7. Entretien avec Monsieur Amadou Boubacar Cissé, Candidat de l’UDR-Tabbat
Monsieur Amadou Boubacar Cissé, vous êtes candidat à l’élection présidentielle du 21 février 2016. Sur quel programme entendez-vous convaincre les électeurs et électrices nigériens pour qu’ils vous accordent leurs suffrages ?
Le programme sur lequel je souhaite convaincre les Nigériens de nous élire au premier tour de l’élection présidentielle du 21 février j’entends le déployer autour d’un postulat donné : c’est »Gouverner le Niger autrement » dans l’unité retrouvée, la justice sociale et le progrès. Ceci suppose de mettre en place un programme de développement économique et social qui permette d’avoir une croissance saine et durable de créer les conditions pour retrouver la fraternité entre les Nigériens, de rassembler les Nigériens. Le programme sera un programme qui va reprendre l’essentiel de ce que nous avons mis en place dans le cadre du PDES 2012-2015 mais qui sera réactualisé en fonction d’un programme de société sur le long terme que nous allons développer. Et corriger ce que nous avons considéré dans le cadre de la gestion de ce PDES 2012-2015 qui n’a pas fonctionné comme on l’aurait souhaité, ou qui n’a pas été conçu dans le sens de la cohérence d’ensemble que nous voulons.
Le premier aspect, c’est l’ensemble des questions liées à la paix et à la sécurité. La sécurité suppose d’abord un rassemblement des Nigériens. Ce que je constate aujourd’hui et qui est pour nous comme un frein réel, c’est la division des Nigériens. Les Nigériens ne s’entendent pratiquement sur rien. Il faut qu’il y ait un minimum de consensus. Et ce minimum suppose que les Nigériens retrouvent leur fraternité, leur convivialité, le respect des uns et des autres pour créer un climat de confiance propice au travail. Les gens peuvent avoir des avis différents, peuvent avoir des conceptions de la vie différentes mais il faut que l’essentiel de nos valeurs puissent être celles que tout le monde accepte. Nous ne pouvons pas être dans une société où il n’y a de respect pour personne, ou les insultes sont la panacée.
Moi je pense que cet élément est essentiel. C’est pour ça que je parle de rassemblement parce que ma conviction est réellement faite qu’il faut que les Nigériens dépassent ces petites préoccupations. Parce que ce sont des dérives que nous n’avons pas connue depuis longtemps. Dans ce rassemblement c’est aussi l’exaltation des valeurs réelles de notre société. Le travail, le mérite, la justice sociale en particulier. Donc cet aspect de question est éminemment lié à la question de sécurité d’ensemble. Parce que les germes de la division, des comportements irrespectueux des uns vis-à-vis des autres sont des éléments propices à créer des situations d’insécurité, au -delà de la lutte contre le terrorisme que nous avons tous acceptée.
Donc il faut créer un cadre général dans lequel les Nigériens retrouvent leur façon de vivre en symbiose entre eux. Il faut qu’il y’ait des institutions stables ; et celles-ci reposent sur une administration de développement qui refuse intégralement l’exclusion. Il faut que les bases de travail que nous allons mettre en place puissent être des bases qui respectent le travail bien fait et le mérite. Voilà la trame de départ. Sur cette base-là, nous voulons avons un développement économique accéléré qui est basé sur une croissance forte, saine et durable. Et cette croissance repose sur un certain nombre de secteur. D’abord un secteur primaire très fort. Donc il faut qu’il y ait une transformation rapide de notre économie qui permet véritablement à l’agriculture de se moderniser, de s’industrialiser, de créer un apport supplémentaire à notre produit intérieur brut, mais aussi de créer les emplois nécessaires pour compenser tout ce que cette démographie galopante ne nous permet pas de réaliser en termes d’emplois. Voilà le point principal.
Quelles sont les moteurs de cette croissance ? D’abord l’aspect énergie qui est à la fois une opportunité et une urgence. Un pays qui veut s’industrialiser, doit nécessairement avoir une énergie abondante, forte, et à bon marché. Et nous avons une possibilité très large de diversifier ces énergies au point d’en faire des ressources d’exportation. Au niveau minier il est important que nous ayons une politique beaucoup plus scrupuleuse de l’intérêt du Niger. Nous ne faisons pas de la coopération qui ne puisse pas tenir compte d’abord de nos intérêts et ça c’est un élément fondamental.
Que ce soit pour les mines que pour autre chose, c’est un élément de patriotisme fort que nous devons avoir dans tout ce que nous allons faire. Tout ce que nous allons faire dans notre coopération avec l’extérieur doit absolument se faire dans le cadre de la préservation absolue de nos intérêts. Cela suppose que nous devons véritablement regarder tout ce qui ne fonctionne pas dans nos coopérations existantes et corriger ce qui peut l’être. Je suis persuadé qu’il y a des niches de performances qui peuvent être trouvées ; qui permettront d’abord de redynamiser un secteur qui doit participer de façon beaucoup plus large à la construction de notre produit intérieur brut et qui puisse aussi générer l’emploi. Au-delà du mythe uranium-pétrole, il y a d’autres possibilités qui peuvent permettre aux petites industries de renforcer l’emploi et la création d’une classe moyenne qui puisse commencer à créer les conditions pour développer le secteur tertiaire.
Nous avons aussi besoin des infrastructures (transport, sanitaires, énergétiques ou éducationnelles) qui devraient se faire dans un cadre d’aménagement du territoire bien élaboré pour que l’équilibre national puisse être respecté. Mais en parallèle, il faut revoir notre enseignement professionnel en particulier pour qu’il soit de plus en plus de qualité. Pour qu’il puisse aussi être le support de toute l’industrialisation que nous voulons faire en développant d’autres types de métiers, en développant les capacités des nigériens, non pas à savoir mais à savoir faire. Il faut bien entendu à côté de cela, continuer de soutenir par une protection sociale digne de ce nom.
Donc un système de santé qui puisse véritablement prendre en charge l’ensemble de notre société. Aujourd’hui la santé de nos populations est un élément fondamental et la manière dont nous sommes en train de faire évoluer cette question me parait de très loin peu satisfaisant. Pour que tout ceci fonctionne, il nous faut que nous ayons à côté de nous un certain nombre de diversification et en particulier créer les conditions pour que le secteur privé puisse générer un certain nombre de ressources. Et pour cela il faut que les conditions soient créées. Il faut qu’on ait une administration qui ne soit pas là simplement pour respecter les textes, mais pour faciliter le travail des autres, pour faciliter l’emploi et l’intégration économique de nos pays, puisque le Niger est dans un ensemble.
Le Niger doit continuer à renforcer sa capacité d’intégration en Afrique, d’ouvrir son marché vers l’Afrique et le reste du monde. Et nous avons pour cela des avantages comparatifs dans certains secteurs importants, l’agriculture, l’élevage par exemple. Nous avons bien sûr dans ce cadre-là, un certain nombre de préoccupations particulières. Et dans ces préoccupations-là, c’est la place de la jeunesse, de la femme, des couches vulnérables qui ne sont pas favorisées depuis longtemps. On ne peut pas imaginer dans un pays ou la jeunesse représente plus de 75% de notre population active, que nous ne puissions pas avoir un programme spécifique à cette frange de notre société. C’est donc là un point sur lequel nous allons présenter un programme très spécifique. Et de la même manière nous allons faire en sorte qu’un programme spécifique puisse être élaboré pour les femmes et qui prenne en compte à la fois la question de leur autonomisation et de leur leadership.
Monsieur Amadou Boubacar Cissé comment comptez-vous mobiliser les ressources nécessaires à la mise en œuvre de ce programme ?
Il faut que nous puissions d’abord mobiliser l’ensemble de nos capacités nationales. Je crois que c’est une idée forte de compter sur soit d’abord. Il faut mobiliser l’intégralité de nos ressources, augmenter l’assiette fiscale. Faire en sorte que nos ressources énergétiques, nos ressources minières soient mieux gérées et puissent apporter beaucoup plus pour favoriser le développement auquel nous aspirons. Evidemment il faut continuer de renforcer notre diplomatie, nos capacités de coopération économique et technique pour que nous puissions bénéficier de l’aide publique au développement. Oui pour les efforts supplémentaires qu’il faut faire à l’intérieure, oui pour les efforts extérieures. Tout ceci pour permettre un développement et un décollage rapide de notre pays.
Monsieur Amadou Boubacar Cissé si vous êtes élus Président de la République quelle sera la priorité des priorités du programme que vous venez de décliner ?
D’abord, il faut rétablir la confiance entre les Nigériens en ramenant la fraternité et le rassemblement. Que les Nigériens dans leur ensemble puissent considérer qu’ils ont en face d’eux un gouvernement responsable et qui s’occupe de leurs intérêts. ça pour moi ce n’est pas évident, parce qu’il y a de l’exclusion, il y a beaucoup d’autres choses.
On veut un gouvernement qui puisse travailler dans l’intérêt du pays. Et mettre en place un système qui permette d’éviter l’exclusion des Nigériens et d’avoir une administration dépolitisée dont le rôle principal sera de faire en sorte qu’on puisse mettre en place les conditions qui permettent aux Nigériens d’avoir confiance en leur administration et qui soit une administration de développement. Voilà les priorités : il faut un état des lieux, il faut une administration dépolitisée. Ca c’est la priorité des priorités, avant de démarrer quoi que ce soit !
8. Entretien avec M. Cheiffou Amadou, candidat du RSD Gaskiya
Monsieur Cheiffou Amadou, vous êtes candidat à l’élection présidentielle 1er tour du 21 février 2016. Sur quel programme entendez-vous convaincre les électeurs nigériens pour qu’ils vous accordent leurs suffrages ?
Mon programme officiel que j’ai déjà annoncé lors du dernier congrès de mon parti, s’appelle »Rassembler pour Bâtir ». C’est un programme intégrateur, un programme cohérent qui tient compte de toutes les préoccupations des Nigériens. Des Nigériens de la ville et des Nigériens de la campagne. Ce programme est conçu pour englober huit (8) axes stratégiques avec un accent particulier sur la jeunesse, les femmes et le monde rural.
Il comporte également une soixantaine de pôles de changements majeurs. Ce que j’appelle pôles de changements majeurs, ce sont les axes plus précis des gouvernements et d’actions concrètes. Exemple, dans le premier axe que j’appelle Démocratie, sécurité et bonne gouvernance, il y a une question qui me semble majeure. C’est la séparation des pouvoirs. C’est fondamental. Par exemple, dans notre pays, la justice qui doit être indépendante et séparée des autres institutions, ne l’est pas encore totalement. A titre d’exemple, c’est encore le Président de la République qui est le Président du Conseil Supérieur de la Magistrature. A ce niveau-là, il y a une action majeure, une orientation majeure qui doit être prise sur laquelle je compte travailler. Autre exemple, le domaine de la santé, un des axes de mon programme et que je considère comme un droit fondamental. Je vais créer, incha Alla, de façon originale au Niger la couverture médicale universelle. C’est-à-dire que tous les Nigériens et toutes les Nigériennes seront soignés gratuitement. Qu’il soit au Niger, citoyen ou non citoyen, l’essentiel, ce qu’il soit au Niger à l’aide d’un système d’assurance de cotisation. Cela se pratique déjà dans beaucoup de pays, y compris les pays pauvres. Une des références à laquelle on se rapporte c’est Cuba qui est l’un des pays le plus pauvre au monde, mais qui se distingue sur le plan mondial par cela. La caractéristique aujourd’hui de notre système sanitaire, tout le monde le sait, c’est vraiment la médiocrité pour ne pas dire l’absence totale de soin.
Vous, quand vous arrivez on vous donne des ordonnances. Tout le monde sait que les services d’Urgence existent mais travaillent dans des conditions extrêmement difficiles. Tout le monde sait que les conditions de soin de la femme et des enfants qui doivent être gratuites ne le sont pas effectivement. Moi je vais proposer au pays un système de couverture médicale universelle où tout le monde en ville ou en campagne sera soigné gratuitement dans les dispensaires et les hôpitaux. C’est tout à fait possible !
Un autre exemple comme preuve d’action majeure, je m’appuierai sur la question de l’impunité. Impunité Zéro ! En quelque sorte j’ai la prétention et l’ambition de supprimer au Niger, l’esprit de corruption. Cet esprit où tout est argent ! Tout reflexe, dans l’administration, dans le public, dans le privé, tout est devenu argent. Un pays qui a atteint ce seuil, a atteint un seuil véritablement dangereux. Parce qu’en ce moment, progressivement, il n’y a aucune valeur qui tienne. Il n’y aura que la valeur de l’argent. Il n’y aura plus de valeur pour créer l’argent. Par conséquent, je voudrais être une référence dans ce domaine, de manière à ce qu’on dise que « voilà, c’est au temps du Président Cheiffou qu’on a commencé à supprimer l’esprit de la corruption au Niger ».
En matière de jeunesse. La jeunesse est très importante dans un pays. Si on arrive à bien traiter la jeunesse, on aura un atout majeur pour le développement. Par contre si la jeunesse n’est pas bien considérée, on risque d’obtenir des effets contraires et même d’aboutir à des crises. C’est ce que nous constatons actuellement : la jeunesse désœuvrée, la jeunesse dans un système éducatif inadapté ; cela ne peut que nous conduire dans la situation que vous connaissez. Dans ce domaine, qui, je l’avoue, est un domaine difficile, j’ai plusieurs projets dans mon programme. Je propose un système d’occupation valorisante des jeunes. C’est-à-dire qu’on ne laisse tomber personne. Il ne s’agit pas de dire que je vais créer tant de nombre d’emplois, il faut s’occuper de tous les jeunes d’une manière générale. Il y a ceux qui auront des emplois, Il y aura ceux qui seront aidés pour être des entrepreneurs, il y aura qui seront en formation et stage, etc… Certains seront orientés vers le monde rural, vers l’agriculture, vers l’élevage. Il faut diversifier et valoriser. C’est ainsi que nous pourrons réserver véritablement un avenir décent. Nous avons également prévu des initiatives de développement accéléré en faveur des jeunes et des femmes. Il y a déjà plusieurs sortes d’initiatives qui ont été initiées par les gouvernements précédents : les distributions des animaux sont des initiatives nouvelles. A cela, je voudrais créer un fond spécial qui va assurer des bonus dans des banques pour les projets des femmes et des jeunes. Ce sont des initiatives sur lesquelles nous allons réfléchir davantage. Nous allons également, surtout en ce qui concerne le monde rural, qui constitue l’essentiel de notre pays, faire une réflexion intégrée et mettre en place une nouvelle stratégie intégrée de développement rural qui intègre l’agriculture l’élevage, l’eau et la formation. Aujourd’hui malheureusement, ce secteur est éclaté : vous avez le ministère de l’Agriculture à part, le ministère de l’Elevage à part, celui de l’Hydraulique à part. Le résultat, lorsque l’un des secteurs est convenablement réglé, tel que par exemple l’alimentation, de l’autre côté il y a l’alimentation du bétail, il y a la sécheresse, il y a l’eau qui manquent. Or le monde rural doit être considéré comme un tout. Dans ce domaine, nous allons faire une véritable révolution.
Monsieur Cheiffou Amadou, comment comptez-vous mobiliser les ressources nécessaires à la mise en œuvre de ce programme ?
Bien sûr ! Ce n’est pas tout d’avoir un programme. Il faut également prévoir les financements. Les moyens de financement de ce programme sont en bonne place dans mon programme qui s’appelle »Rassembler pour bâtir le Niger ». Parmi les ressources auxquelles nous faisons appel, il y a d’abord les ressources classiques. Dans ce domaine, nous allons commencer à faire une meilleure gestion de notre budget. Aujourd’hui nous pensons qu’il n’y a pas un équilibre en ce qui concerne l’affectation des ressources internes et même externes reçues dans notre pays. Je donne comme exemple la quantité des crédits alloués aux activités politiques, les fonds politiques, les chargés de missions politiques, les conseillers techniques politiques et d’autres dépenses, je considère que nous allons fixer un taux maximal pour que ce soit des dépenses par rapport aux recettes réelles de notre budget.
Première mesure en ce qui concerne les ressources internes, une meilleure qualification, un meilleur assainissement des ressources internes existantes.
Deuxième catégorie de ressources : les ressources innovantes. Qu’est-ce que j’appelle les ressources innovantes ? Ce sont d’abord les ressources provenant des différents partenaires. Le Niger a un taux démographique très élevé. Le taux démographique est tel que la croissance ne suit pas ce taux démographique. Nos recettes budgétaires se trouvent donc en deçà de nos besoins. Alors qu’est-ce qu’il faut pour combler ce gap ? Pour combler ce gap, il faut faire appel à des investissements privés. Ces investissements qui rentrent dans le cadre du partenariat public-privé peuvent servir au Niger à rattraper le gap. Ceci d’autant plus que nous avons des voisins, de proches voisins comme le Nigéria qui ont la capacité de nous apporter l’aide dans ce domaine. Je le dis en connaissance de cause. Ayant pris des initiatives personnelles, j’ai pris des contacts avec des privés du Nigéria et j’ai pu mobiliser pour le Niger, des actions d’intervention de plus d’un (1) milliard de dollars. C’est simplement un exemple. C’est ce genre de ressources innovantes auxquelles il faut faire appel. D’autres instruments qui sont plus techniques, tel que le rachat des dettes, le recours à des dettes moins lourdes, moins chères, etc.
Troisième volet, c’est la valorisation de nos ressources existantes. Nos ressources minières en particulier l’uranium, le pétrole, l’or, etc… Cette revalorisation passe par une diversification des partenaires. En faisant diversifier les partenaires, nous serons en ce moment, en mesure d’obtenir plus avec nos ressources actuelles.
Enfin, quatrième possibilité, ce n’est pas seulement la fin, mais ce que j’ai en tête et qui est dans mon programme, c’est l’exploitation de nos gisements dormants. J’ai même entendu dire que le Niger est un accident géologique. Nous avons de l’Or, tout le monde le sait, dans le Nord aujourd’hui, il y a une ruée vers le Nord. Alors qu’est-ce que nous attendons pour exploiter pour les ressources de notre budget cet Or dont on parle en qualité massive. On parle aussi du marbre. Nous disposons semble-t-il de véritables montagnes de marbre, y compris du marbre cher. Nous disposons d’autres minerais dormants dont l’exploitation aujourd’hui, compte tenu des besoins du marché mondial, nécessite qu’on y pense très rapidement.
Voilà un peut les catégories de ressources auxquelles nous allons faire appel pour financer notre programme.
Monsieur Cheiffou, si vous êtes élu Président de la République quelle sera la priorité des priorités du programme que vous venez de décliner ?
Vous savez bien, dans notre pays tout est prioritaire. En réalité, on va s’atteler à la priorité qu’on trouve. Toutefois, aujourd’hui au Niger, une continuité. Nous avons une épine dans le pied qui concerne l’insécurité. C’est d’abord ça qu’il faut régler. Je m’attacherais avec la dernière énergie à régler le problème et à rendre le Niger sûr. Encore plus sûr.
Ceci dit, après ça, ma priorité c’est la jeunesse. Après la jeunesse, le monde rural. Bref, nous sommes dans un pays où tout est prioritaire, personne ne sera laissé sur le bord du trottoir. La priorité, en réalité, c’est l’action. La priorité concerne la remise au travail de l’administration. Car, quelque soient les ressources que nous avons, s’il n’y a pas une administration efficace, une administration qui travaille, nous ne pourrons même pas utiliser les ressources qui seront mises à notre disposition. Je crois que c’est le cas actuellement. Très peu de ressources ont été décaissées, parce que tout simplement, nous avons une administration qui n’est pas suffisamment performante. Dans les priorités, il y a la remise au travail de l’administration de manière à ce que nous puissions consommer avec la vitesse voulue. Car au Niger, les besoins sont tels qu’il faudrait vraiment faire plus et mieux que par le passé. Nos besoins sont tel qu’il faudra travailler pour rattraper le retard. Nous sommes le dernier pays au monde. Tout le monde le sait et nous le sommes depuis longtemps. Ce n’est pas la faute de X ou Y mais, c’est bien un problème conjoncturel qui est là. Il est posé et personne ne s’arrête. Nous aussi nous ne devons pas nous arrêter. Nous devons faire plus. Il faut absolument des investissements lourds et massifs. Il faut travailler vite et fort. Remettre les gens au travail, mais surtout supprimer définitivement cet esprit de corruption qui nous rabaisse tous les jours.
Incha Allah, avec l’aide et la compréhension de nos concitoyens et concitoyennes, on arrivera à bout.
Je vous remercie.
9. Entretien avec M. Ibrahim Yacoubou, candidat du MPN Kiishin Kassa
Monsieur Ibrahim Yacoubou, vous êtes candidat à l’élection présidentielle 1er tour du 21 février 2016. Sur quel programme entendez-vous convaincre les électeurs nigériens pour qu’ils vous accordent leurs suffrages ?
Nous avons conçu et élaboré, au niveau de notre parti, un programme socio-économique et culturel pour porter notre projet de gouvernance et puis trouver les moyens de résoudre les crises essentielles et récurrentes qui se posent au peuple nigérien depuis un certain nombre d’années. Ce programme, il s’appelle le »Niger autrement ». Et nous l’avons construit autour de 12 axes stratégiques que nous considérons comme essentielles pour construire une économie de croissance, résorber le déficit social notamment dans le cadre des secteurs de bases et des secteurs essentiels ; redonner de la respiration démocratique au Niger ; créer les conditions d’un développement durable et assurer les conditions de la sécurité et de la paix de notre pays.
Les douze orientations stratégiques que nous avons adoptées dans le cadre de notre programme sont: premièrement, c’est renforcer le patriotisme et l’unité nationale. Car nous considérons que le 1er élément moral que nous devons développer chez les Nigériens pour qu’ils croient en eux-mêmes et en leur pays, pour qu’on crée l’énergie nécessaire afin qu’ils s’engagent dans la construction du pays, c’est l’amour de la patrie. Nous devons considérer, en toute chose et à toute fin, d’abord l’intérêt du pays, et après les autres intérêts accessoires. Dans la même thématique, nous avons pris comme engagement de créer les conditions de la construction et de la consolidation de l’unité nationale. Le vivre collectif, la Nation, doit être renforcé. C’est une construction permanente à laquelle l’Etat doit s’investir et à laquelle l’Etat doit être mobilisé. C’est pour cela que nous avons dit que la première thématique, c’est le patriotisme et l’unité nationale. Et dans le cadre de la partie unité nationale, nous avons dit que nous allons faire modifier les lois pour qu’il n’y ait plus jamais référence à une ethnie dans le cadre du recensement ou des actes d’Etat civil. La seule ethnie, c’est la Nation nigérienne, le seul pays, c’est le Niger. Pour nous, la première thématique, c’est celle là, renforcer le patriotisme et promouvoir l’unité nationale.
Deuxième thématique, c’est garantir durablement la sécurité et la paix. Il n’y a pas d’Etat, il n’y a pas de vie possible, il n’y a pas de développement qu’on puisse envisager s’il n’y a pas la sécurité. Nous sommes convaincus, et tous les Nigériens le sont désormais, que nous allons vivre, et ce pour longtemps, sous des menaces permanentes, multiples et qui évoluent. Il y a le terrorisme qui a pris beaucoup de formes, il y a des violences pour le contrôle des ressources, il y a des groupes armés qui se développent, il y a des trafics qui rapportent beaucoup d’argent et qui portent en eux-mêmes la violence, la drogue, le trafic d’êtres humains ou les armes. Ensuite, notre pays est aujourd’hui dans une configuration qui fait que nous sommes à la frontière de beaucoup de conflits et de beaucoup de problèmes ou d’autres trafics. Donc, nous avons dit qu’il faut reformer la doctrine de l’Armée. Les menaces ayant évolué, il faut une nouvelle doctrine qui puisse permettre à notre Armée de s’adapter et de faire le travail nécessaire. Il faut ensuite organiser l’implantation de notre Armée dans tout le territoire national. Et il faut faire du Niger le maillon fort de la sécurité internationale. Si nous voulons vivre dans un pays de paix, il faut que nous soyons attentifs et que nous développions le partenariat international nécessaire auquel le Niger va être partie prenante, et qui nous permettra de protéger notre pays. Il faut que nous nous engagions, et en tout cas nous l’avons écrit dans le programme, à ne jamais tolérer la présence d’une armée hostile au Niger, sur notre territoire.
Troisième orientation stratégique, c’est défendre la démocratie et promouvoir l’Etat de droit. Nous avons fait exprès de mettre défendre la démocratie, parce que la démocratie, c’est une conquête perpétuelle. Quel que soit le pouvoir, si on ne lui met pas des garde-fous, si on ne lui oppose pas une vigilance citoyenne et une exigence citoyenne, il aura tendance à abuser et à se conforter dans les positions de droit qu’il a. C’est pour cela que nous avons dit que notre orientation stratégique, c’est la démocratie, la protéger et lui donner un contenu. Quand on regarde l’histoire du Niger, la plupart des citoyens sont dans un rapport de dépossession avec la démocratie. A partir des élections, plus aucun compte n’est rendu aux citoyens. Ils n’ont plus de prise avec le pouvoir, alors que le principe de la démocratie, c’est le pouvoir du peuple par le peuple et pour le peuple. Dans la réalité ce n’est pas tout à fait vrai. Dans le cadre de notre programme, nous allons instituer des lois d’initiatives populaires. A partir de 25.000 signatures, les Nigériens de toutes les régions, de toutes les communes, ou des toutes localités confondues, peuvent estimer avoir le droit de proposer des lois qui peuvent reformer la société ou qui peuvent permettre à l’intérêt général de se concrétiser. Dans le cadre de notre programme, nous avons dit que ferons une réforme de la Constitution pour introduire la possibilité qu’un certain nombre de Nigériens se mettent ensemble et proposent des lois d’initiatives populaires. Nous avons dit aussi que si la démocratie est le pouvoir du peuple, il faut que le pouvoir du peuple soit permanent, même dans des communes ou dans des régions. Et nous avons introduit qu’il est possible que les Nigériens, dans une commune ou dans une région donnée puissent initier des référendums sur des questions locales, et qu’au niveau national, nous citoyens, puissions dire que nous avons des préoccupations et puissions instituer aussi des référendums citoyens. Donc, ces deux dispositions, Incha Allah, si les Nigériens nous font confiance, nous les mettrons dans la Constitution, parce que si la démocratie ne respire pas, elle va être dans la situation que nous avons aujourd’hui. C’est-à-dire que vous êtes consultés à l’occasion des élections, mais après, vous n’avez plus de pouvoirs, vous n’avez plus les moyens de faire en sorte que ceux qui vous représentent et ceux qui vous dirigent tiennent compte de vos préoccupations. Nous ne voulons pas d’un mandat en chèque en blanc. Nous avons mis cette orientation comme élément fondamental de notre programme, en même temps que nous avons dit qu’il faut construire l’Etat de droit. Il faut que l’Etat reste une personne morale soumise au droit de même niveau que le citoyen. Il faut aussi que la justice reste le monopole du peuple. Il n’y aura pas de justice privée, et il n’y aura pas de justice inégale pour les citoyens. Donc, on construira l’Etat de droit sur la soumission de l’Etat aux normes qui sont en place et sur l’égalité des citoyens et l’accessibilité des citoyens à une justice à laquelle ils ont confiance.
Le 4ème axe, c’est de construire une économie de croissance et de redistribution. Nous avons mis dans le programme que l’Etat doit créer les conditions d’une relance économique: premièrement, en faisant de l’Etat l’agent impulseur et amplificateur des investissements publics. L’investissement public crée la richesse et permet à l’économie de se relancer ; deuxièmement, il faut faire du secteur privé également un autre moteur de notre croissance économique en créant les conditions de l’assainissement, d’un environnement favorable aux affaires. Et le développement du secteur privé a un autre avantage, c’est qu’il permet la relance de l’économie par la multiplication ou l’amplification de la capacité d’absorption de l’économie. Lorsque l’économie a une meilleure capacité d’absorption, elle permet l’afflux d’autres capitaux, ou en termes d’appuis, ou en termes d’investissements. Et nous avons dit qu’il faut que ce soit une économie de croissance. Il faut que la redistribution soit concrète dans la vie des Nigériens, puisque vous savez qu’en termes de pauvreté au Niger, tous les indicateurs montrent que tant par rapport à l’impact ou à l’incidence, qu’à la profondeur de la pauvreté, les indicateurs sont trop mauvais. Mais il y a aussi un autre indicateur, c’est la pauvreté monétaire qui est généralisée au Niger. Donc, nous avons dit que nous allons construire une économie de croissance et de redistribution.
5ème axe, c’est autonomiser et responsabiliser la femme. Il faut créer les conditions d’égale opportunité entre les hommes et les femmes. Il faut protéger la femme, elle est devenue une personne vulnérable, et même la pauvreté, nous avons dit qu’elle a un visage, c’est celui de la femme. Nous avons mis une thématique précise pour que la femme soit autonomisée et qu’elle soit responsabilisée. Dans notre projet de société, nous avons dit que les jeunes et les femmes vont être les acteurs de la transformation. Si on veut qu’ils soient responsabilisés comme acteurs sociopolitiques, nous avons dit qu’il faut créer les conditions de leur épanouissement, et c’est pour cela qu’après l’orientation dédiée aux femmes, nous avons également une orientation dédiée à la jeunesse. Il faut autonomiser, il faut responsabiliser les jeunes. La structure de la population nigérienne fait que, dans l’essentiel, nous avons une population très jeune, une population qui a du talent, et nous avons joint à cette thématique la possibilité et l’obligation pour l’Etat de faire un projet de société qui tend vers le plein emploi. Nous avons dit que notre politique, c’est un Nigérien, une formation, un emploi décent. Il faut aller à l’école, il faut aller dans les centres de formation, mais il faut qu’au bout de la formation, quelle qu’elle soit, elle puisse prédestiner le Nigérien à voir un emploi décent qui puisse lui permettre de vivre décemment.
L’autre thématique, c’est restaurer la souveraineté sur les ressources naturelles du Niger. Le Niger est un grand producteur d’uranium. Il est un modeste producteur d’or et de pétrole, mais il est quand même un producteur, et on exploite des ressources naturelles dans notre pays. Premier constat, c’est de dire que la contribution de ces secteurs est assez marginale et même modeste dans la richesse de notre pays, de l’ordre de 5 à 6%. Et deuxième constat, c’est que la production de ces ressources est entourée d’opacité. Les Nigériens ne se sentent pas maitres de leurs ressources naturelles. C’est pour cela que dans le cadre de notre programme, nous avons dit qu’une des premières actions que nous allons faire dans le domaine des ressources naturelles, c’est de convoquer les états généraux sur les ressources naturelles. Il faut que les Nigériens s’approprient leurs ressources naturelles. C’est vrai que nous n’avons pas les moyens, nous-mêmes et par l’Etat du Niger, de faire une chaine de production à 100% pour exploiter ces ressources, mais nous avons le devoir, en tant qu’Etat, de faire en sorte que chaque Nigérien puisse savoir à quoi servent les ressources qui sont tirées de l’uranium ? Comment est-ce que le prix de l’uranium est construit ? À quel usage les ressources sont utilisées ? À quelles conditions le partenariat que nous avons conclu avec les sociétés internationales est avantageux pour le Niger, ou il ne l’est pas ? Dans quelles conditions ces accords sont convenus? Il y a un besoin de transparence. Au demeurant, c’est le minimum si on veut se conformer à la Constitution de 2010 qui fait obligation au gouvernement en place d’assurer le maximum de transparence sur la nature des contrats et l’utilisation des ressources qui sont faites. Donc, nous avons voulu mettre dans le programme une occasion pour tous les Nigériens pour être édifiés sur tout ce qui se passe autour des ressources minières.
Neuvième orientation stratégique, c’est redresser les indicateurs sociaux de base. Les indicateurs sociaux de base, il y en a à peu près quatre que nous avons mis dans le programme, que nous devons traiter. Le premier sous-secteur que nous devons traiter, c’est la question de l’école. Comme vous le savez, l’école a une vocation de former le citoyen lui-même, pour qu’il soit utile à lui-même, utile à son environnement et qu’il soit utile au développement du pays. Il n’y a pas d’exemple de société qui s’est développée sans éducation, de même qu’il n’y a pas d’exemple de société qui s’est développée sans santé. Aujourd’hui, par rapport à l’éducation, nous avons la problématique de la qualité de l’éducation. Puisque l’école n’est pas censée faire uniquement des chiffres. Nous avons l’obligation de faire une école gratuite obligatoire et une école de qualité. Nous allons travailler pour que l’école soit réellement universelle, que chaque citoyen puisse accéder à l’école, et lorsqu’il va à l’école, qu’il puisse apprendre un contenu qui lui permette d’être utile dans sa vie et dans la vie de la collectivité. Donc, nous allons mobiliser l’Etat pour qu’il investisse dans la qualité de l’éducation, et qu’il investisse dans la revalorisation du statut de l’enseignant. Si on veut une école de qualité, il faut que celui qui l’incarne et celui qui la porte puissent être dans des conditions de formation et de motivation nécessaires pour lui garantir de jouer ce rôle. Nous avons indiqué que nous ferons en sorte qu’il y ait 3000 classes par an et 3000 enseignants par an. Nous avons également dit que la problématique de la santé au Niger est assez simple. Si je dois schématiser et résumer, je dirais que c’est la proximité et la qualité. Pour le moment, ces indicateurs ne sont pas atteints. Même en termes d’accès géographique, en considérant qu’un citoyen doit être au moins à cinq kilomètres d’un centre de santé, les indicateurs sont de mauvais à acceptables. Quand vous prenez les indicateurs mauvais, c’est par exemple la région de Zinder où vous avez dans cette zone, à peu près seulement 34 à 36% des Nigériens qui peuvent avoir un centre de santé à cinq kilomètres. À Niamey, c’est un peu mieux puisque nous sommes à 74% sur les chiffres qui sont connus. Ça, c’est le premier indicateur qu’il faut réunir, nous avons pris des engagements sur le nombre des centres de santé que nous allons construire sur les cinq ans. Mais le deuxième indicateur de la santé, c’est la qualité. Lorsque vous allez dans un centre santé, il faut trouver des médicaments et le personnel compétent pour assurer l’administration de ces médicaments. Pour nous, la qualité c’est par rapport au personnel médical et aux produits qu’on peut trouver dans un centre de santé. Et ces questions-là, nous les considérons comme prioritaires pour notre pays, et nous mobiliserons l’Etat pour le faire. De même que nous avons des engagements chiffrés sur l’accès à l’eau. Nous allons faire en sorte que chaque Nigérien ait accès à l’eau. Et pour le moment, ces indicateurs-là ne sont pas satisfaisants de notre point de vue et du point de vue des Nigériens qui vivent un véritable drame dans leur quête perpétuelle d’avoir un point d’eau pour eux-mêmes ou leurs animaux. Notre projet, nous l’avons dit dans le préambule, c’est un Etat social. L’Etat social doit considérer comme prioritaires les secteurs sociaux, la santé, l’éducation et l’eau. C’est pour cela que nous avons fait de ces questions une orientation stratégique à part. Et une autre orientation stratégique, c’est moderniser le secteur rural et réaliser la souveraineté alimentaire. Les Nigériens doivent pouvoir vivre de la production agricole, d’abord manger à leur faim, et vivre de leur production agricole en tant que moyen économique d’existence. La première préoccupation des Nigériens, c’est de manger à leur faim. À l’intérieur de cette préoccupation, vous avez aussi la qualité de la nutrition. La proportion des enfants malnutris n’a pas beaucoup évolué au Niger entre 2005 et 2015. Il y a eu des moments où ça s’est amélioré, mais globalement, nous sommes toujours dans une situation critique vis-à-vis de la malnutrition des enfants et nous avons pris des engagements pour que l’Etat soit mobilisé, pour que chaque Nigérien puisse manger à sa faim, et que les Nigériens puissent manger une nourriture saine et de qualité. Comme d’ailleurs la Constitution nous l’a prescrit, en son article 12. Nous avons donc une obligation morale d’assurer aux Nigériens de pouvoir manger, mais nous avons également une obligation constitutionnelle lorsque nous nous engageons à diriger ce pays, que nous puissions chacun avoir droit à une alimentation saine et suffisante.
La 11ème orientation stratégique, c’est réaliser l’unité africaine. Nous considérons comme objectif politique que nous devons réaliser au niveau de notre pays l’unité africaine, cela évidemment implique que nous ayons une coopération sous-régionale permettant d’aboutir à cet objectif là que les Nigériens se sont fixé depuis plus de cinquante ans, dans le cadre de la première organisation qui a été créée à cet effet.
La 12ème orientation stratégique, c’est réhabiliter la culture. Nous avons dit que nous sommes un mouvement patriotique et que nous sommes fiers de l’attachement des Nigériens à leur pays. Mais l’attachement des nigériens à leur pays, c’est l’attachement des Nigériens à leur culture, à tout ce qu’elle a de positif, à tout ce qu’elle a comme richesses. C’est pour cela que nous avons dit que nous mettrons en place un programme qui permet de développer la culture comme élément d’identification et de repère pour chaque citoyen, mais également la culture comme industrie au service de ceux qui la pratiquent, de même que nous mobiliserons l’Etat pour réhabiliter les arts et les sports.
Ce sont là les 12 orientations stratégiques que nous avons identifiées et à l’intérieur desquelles nous avons attaqué tous les secteurs de la vie socio-économique et culturelle de notre pays pour faire un projet de rupture, un projet qui permet aux Nigériens de renouer avec la confiance, de croire en leur capacité de changer leur pays et d’améliorer leur vécu.
M. Yacoubou, comment comptez-vous mobiliser les ressources nécessaires à la mise en œuvre de ce programme si vous êtes élu ?
Nous avons estimé que les moyens à mobiliser tant à l’interne qu’à l’externe pour financer ce programme sont de l’ordre de 9.000 milliards sur les cinq prochaines années Inch’Allah, et j’avais dit que nous avons évalué toutes les hypothèses en prenant les plus réalistes et en tenant compte de notre volonté de faire un programme ambitieux.
Premièrement, comme je l’ai dit, il faut que l’Etat crée les conditions de la relance économique. C’est l’économie qui permet de créer la richesse et de financer tous les projets de développement. Ensuite, l’Etat doit être l’agent qui va relancer l’économie, par l’investissement public. Nous avons identifié un certain nombre de projets que nous allons mettre en œuvre dans tous les secteurs, et l’Etat sera le premier agent de la relance de notre économie. Le deuxième agent, c’est le secteur privé. Nous avons dit également dans le cadre de notre programme comment nous comptons mobiliser le secteur privé pour qu’il relance l’économie et qu’il améliore la capacité d’absorption de notre économie. Deuxièmement, c’est l’administration. Il faut une administration de développement. On le dit souvent, mais la réalité est encore plus tenace lorsqu’on sait que si vous n’avez pas une administration qui produit un service de qualité, qui permet de délivrer un service public à tous les citoyens et qui permet aussi à l’économie de fonctionner, vous ne pouvez pas construire ou avoir les bases de développement. Nous allons construire une administration de qualité avec des agents motivés et de agents formés pour produire un service de qualité et qui participe à la relance économique.
Troisièmement, c’est les services fiscaux. Nous avons dit que nous allons faire en sorte que l’Etat réussisse l’efficience en matière de mobilisation des ressources, ce qui veut dire qu’il va faire en sorte qu’aucun franc qui est dû à l’Etat, qui est dû au Trésor Public ne puisse ou être perdu ou ne pas être mobilisé. Donc nous allons moderniser les services des impôts et des douanes, et nous allons créer les conditions de l’adaptation à la transition fiscale. Nous avons également retenu de réduire le train de vie de l’Etat ; pour que l’Etat ne puisse financer que les choses qui sont essentielles à la construction de développement et qu’on impose à l’Etat une rationalité économique et financière, et une pertinence sociale lorsqu’il finance ses projets.
M. Ibrahim Yacoubou, quelle serait alors la priorité de vos priorités si vous êtes élu Président de la République?
Tout est prioritaire dans un pays où le niveau ou le bilan social est aussi mauvais. Pour moi, la première priorité, c’est redonner confiance aux Nigériens. Il faut que les Nigériens aient le moral, il faut qu’ils croient en eux-mêmes et à leur pays, puisque pour le moment ce que nous partageons le plus entre nous c’est de la désillusion, le désespoir, le peu de motivation de considérer que les choses doivent aller comme ça et que nous devons accepter la situation actuelle. Après le réarmement moral que nous devons nous imposer nous Nigériens si nous voulons avoir l’énergie de transformer notre pays, il y a des secteurs prioritaires qu’il faut financer. Il y a la question des secteurs sociaux, il y a la question de la sécurité, et maintenant impulser les fondamentaux économiques tels que le développement infrastructurel et le développement rural.