Niger, 06 Mai (ANP) – L’administration nigérienne souffre d’une faible culture de résultats, de déficit de ressources, d’abus divers (absentéisme, politisation, népotisme, …), de déficit managérial, de régimes de traitements disparates qui expliquent sa faible capacité à offrir un service public de qualité, selon diverses analyses diagnostiques.
Une étude du Laboratoire d’études et recherches sur les dynamiques sociales et le développement local (LASDEL), à la demande du Haut Commissariat à la Modernisation de l’Etat (HCME), met en index des pratiques « routinières qui s’écartent des lois, règles, règlements et instructions qui régissent la fonction publique au Niger ».
Bien plus, les pratiques de l’Etat sont aussi en cause avec des comportements « non-observant » contribuant au dysfonctionnement de l’Administration publique nigérienne, et ce, dans un environnement confronté aux défis de disponibilité de données fiables, de la faible qualité des performances et de l’absence de suivi des performances, etc.
Le nouveau Premier Ministre Ouhoumoudou Mahamadou, en connaisseur de la chaine administrative, entend rompre avec la tradition.
C’est le sens de la rencontre initiée le 15 avril dernier avec les différents Secrétaires Généraux des Ministères dans l’optique de les éclairer sur leurs rôles stratégiques dans le fonctionnement de l’Administration publique nigérienne, ainsi que les défis de suivi et évaluation.
Le Chef du Gouvernement nigérien compte combattre les tares de la fonction publique, ou tout au moins en réduire dans la droite ligne de l’engagement du Président de la République Mohamed Bazoum en matière de gouvernance.
Le renforcement de la gouvernance administrative à travers l’amélioration de l’efficacité de l’administration publique et la qualité des services publics fournis aux citoyens est l’un des axes majeurs du Programme de Renaissance 3.
L’accent est mis sur la promotion de la bonne gouvernance, la rigueur au travail, l’objectivité dans l’évaluation de la promotion des compétences, la dématérialisation systématique des procédures essentielles aux gestions financières, administratives et celles des ressources humaines.
Il est prévu l’opérationnalisation effective du Budget-programme pour renforcer la redevabilité et l’efficacité des administrations publiques, et enfin la mise en place d’un répertoire des emplois et de compétences et l’amélioration du pilotage administratif des Ministères.
Il y a donc nécessité de réformer l’Administration publique nigérienne. Mais ce sera une œuvre de longue haleine en ce qu’il s’agit de changer des mentalités vieilles de plusieurs décennies. Elle prendra nécessairement du temps.
Les spécialistes préconisent « de partir de la réalité nigérienne telle qu’elle est » et non « des nouveaux modèles de normes officielles préfabriqués par des bureaux d’études extérieurs ». Il s’agira de « faire le tri au sein des normes pratiques existantes, en cherchant à en supprimer certaines, les plus nocives, et à en faire évoluer d’autres, mais aussi sans doute en s’appuyant sur certaines, tout en tolérant d’autres et en essayant d’en faire émerger peu à peu de nouvelles ».
« La réforme de la culture administrative doit sans doute se combiner avec une réforme de la culture politique », en ce que « ces deux domaines sont profondément inter-reliés et interdépendants ».
Déjà, note-t-on, des initiatives sont entreprises, notamment avec le Haut Commissariat à la Modernisation de l’Etat qui a lancé le projet d’Appui à la Modernisation de l’Etat pour un Service Public de qualité sur le territoire (AMESP). Ce projet vise le développement territorial dans les zones excentrées et enclavées, en l’occurrence les zones nomades des Régions de Tillabéry, de Diffa et de Tahoua.
Lancé en janvier 2020 pour une période programmatique de trois ans (2020-2022), ce projet a pour finalité de contribuer au renforcement des conditions techniques et managériales d’exercice des fonctions de l’Etat aux niveaux décentralisé et déconcentré pour plus d’efficacité dans l’offre de services aux populations.
Le Haut Commissariat à la Modernisation de l’Etat propose également, pour un meilleur exercice de la fonction de Secrétaire Général d’un Ministère, de relever sa rémunération, d’assurer une certaine stabilité dans le poste avec une durée moyenne de 3 à 5 ans et au besoin un cahier de charges et la réactivation de la conférence des Secrétaires Généraux des Ministères, ce dispositif institutionnel et cadre complémentaires aux réunions des différentes instances ministérielles.
KPM/CA/ANP-034 Mai 2021